• Le controversé projet de loi pour « sécuriser » internet définitivement voté
    https://www.nouvelobs.com/politique/20240410.OBS86943/le-controverse-projet-de-loi-pour-securiser-internet-definitivement-vote.

    Cyberharcèlement, arnaques sur internet, accessibilité des sites pornographiques aux mineurs… autant de fléaux auxquels le texte tente de répondre. Plusieurs députés se sont inquiétés de la menace qu’il fera, selon eux, peser sur les libertés publiques.

    Enfin, Internet va devenir un lieu de non-droit. Non-droit de s’exprimer, non-droit de lire, non-droit de partager, non-droit de rigoler, non-droit de faire de la politique.

    • Ce délit d’outrage en ligne permettra de sanctionner le fait de « diffuser en ligne tout contenu qui soit porte atteinte à la dignité d’une personne ou présente à son égard un caractère injurieux, dégradant ou humiliant, soit crée à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ». Un « délit flou » qui « déroge […] à la loi de 1881 », s’alarme l’association de défense des libertés numériques La Quadrature du net.

      on va enfin pouvoir punir les auteurs de lèse-majesté en ligne !

  • Le chamboule-tout des métiers de la grande distribution, percutés par l’IA, la location-gérance et l’essor des caisses automatiques
    https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/04/11/grande-distribution-le-big-bang-dans-l-emploi_6227113_3234.html

    Jusque-là, les manageurs construisaient les plannings des 450 salariés de cette grande surface, située dans le centre commercial Aushopping Porte D’Espagne, et ils les affichaient quinze jours à l’avance. Désormais, pour les quatre-vingts personnes du « secteur des caisses » en phase de test, c’est « le logiciel qui, avec ses paramètres, va répartir la charge de travail à couvrir ».

    Difficile de discuter avec « la machine » autour d’un café dans l’espoir d’adapter son planning. « Elle ne regarde pas si une employée, âgée de 57 ans et opérée des épaules, est en bout de course, fatiguée, pour lui aménager ses plages horaires », souligne Mme Prieur. L’un de ses collègues qui avait l’habitude de travailler six heures par jour pendant trois jours s’est ainsi retrouvé subitement avec un emploi du temps de sept heures et trente minutes pendant deux jours, complété d’une journée de trois heures.

    Ça te parle d’intelligence artificielle, quand il ne s’agit que d’un algorithme de rangement multi-critère.

    • Faut bien bien comprendre qu’en réalité, la machine continue de faire ce pour quoi elle a été programmée. Il y a tout a fait de la place pour indiquer que telle « ressource humaine » est empêchée sur certaines tâches ou horaires, c’est juste le paravent derrière lequel on planque l’intensification de la dégueulasserie.

      Et pendant ce temps-là, on parle moins des autres pratiques 🤮 :

      A commencer par le développement de la location-gérance et de la franchise, deux modes de gestion des grandes surfaces moins coûteux en capital pour les grands groupes, mais moins protecteur sur le plan social pour les salariés.

      Carrefour s’en est fait une spécialité. Depuis 2018, 305 magasins, dont 80 hypermarchés, sont passés en location-gérance par vagues successives. Plus d’un tiers de ses hypers et les trois quarts de ses supermarchés sont aujourd’hui en franchise, contre respectivement moins de 10 % et moins de 60 %, il y a cinq ans.

      Conséquence, 23 000 salariés sortis des effectifs du groupe, dont « 4 000 en 2024 », selon Sylvain Macé, délégué syndical de groupe pour la CFDT chez Carrefour et secrétaire national de la Fédération des services. D’environ 115 000 salariés, en France, en 2018, l’entreprise n’en compte plus que 80 000 aujourd’hui, selon les syndicats. « Nous ne communiquons pas de chiffre des effectifs en France hors franchise », répond de son côté la direction.

      J’ai vu ça au Carrefour Market de mon ex-bled : racheté en gérance par un comptable qui spécule sur plusieurs super du coin, ça a juste été un carnage social, avec plus aucun avantage pour les salariés et la suppression de l’ancienneté sur le gâteau : les gens sont revenus au salaire de départ et en plus il ont perdu les syndicats, les CE, etc.
      Dégueulasserie.

    • Faut bien bien comprendre qu’en réalité, la machine continue de faire ce pour quoi elle a été programmée

      Rah, merci ! 🙏 le truc que je répète à longueur d’année, à mes proches, mes moins proches, mes étudiants… (ça me rappelle le fil « j’aime seenthis » sur lequel j’ai rien mis, mais voilà, des petites bulles comme ça que je ne lis qu’ici…)

      Et bravo pour la trouvaille de l’article.

    • @biggrizzly Algorithme de planification. Toujours la même histoire, derrière il y a une fonction objectif, et le bidule est la pour maximiser (ou minimiser, pareil) la fonction en question. L’humain n’a aucune place là dedans, quels que soient les arguments (foireux dans 100% des cas).

    • Faut bien bien comprendre qu’en réalité, la machine continue de faire ce pour quoi elle a été programmée

      Comme les nazis qui ne faisaient qu’obéir aux ordres, et comment cette déresponsabilisation perdure puisqu’on continue d’obéir aux ordres d’un monde productiviste logiquement eugéniste.
      L’ordre est donné à la machine de fabriquer du profit, dans cet optique il est normal que la femme de 57 ans qui a mal aux épaules soit soumise aux mêmes horaires que les jeunes vigoureux, elle sera éjectée plus tôt du circuit.
      Si elle se plaint, elle peut aller voir l’autre machine, celle à soigner, qui lui ponctionnera 5€ si elle est en retard et la remettra au travail illico.

  • SNU : la faute de l’Education nationale | Le Club
    https://blogs.mediapart.fr/b-girard/blog/110424/snu-la-faute-de-leducation-nationale

    Dans quelques semaines, la participation forcée des élèves de Seconde rend de facto le SNU obligatoire. Avec la mise au pas de la jeunesse autour d’une mystique identitaire par une contrainte de type militaire, c’est aussi le service public d’éducation, maître d’œuvre et maître d’ouvrage du dispositif, qui change de nature.

  • Un crime de possession : épisode • 1/4 du podcast Féminicides, la guerre mondiale contre les femmes
    https://www.radiofrance.fr/franceculture/podcasts/lsd-la-serie-documentaire/un-crime-de-possession-7888885
    https://www.radiofrance.fr/s3/cruiser-production-eu3/2024/04/59a7ae7f-0ce4-4e21-b7e3-18be98537b00/560x315_sc_ciudad-juarez.webp

    La première colonie de l’humanité, c’est le ventre des femmes. Le crime féminicidaire remonte au moins au néolithique et structure toutes les sociétés patriarcales.
    Dans ce système, les hommes considèrent les femmes, leurs corps, leurs ventres comme leurs propriétés. L’anthropologue argentine Rita Laura Segato compare le féminicide à une sorte d’écriture, de signature de ces auteurs, sous la forme du “surmeurtre” (overkilling), c’est-à-dire que ces hommes tuent au-delà de la mort, profanent, violent, démembrent les corps de ces femmes qu’ils chosifient. Son travail et ses enquêtes démontrent pour elle “la féminisation de la guerre, c’est-à-dire qu’aujourd’hui les nouvelles guerres se réalisent au travers du corps des femmes. C’est une forme de guerre où l’ennemi est vaincu sur le corps des femmes… en le détruisant, en l’utilisant, en le capturant, en le violant ou en le prostituant.”

    Car le féminicide recèle toujours le même message de possession. Qu’il s’agisse dans le cadre des féminicides conjugaux d’une menace pour la conjointe qui souhaiterait retrouver sa liberté (si tu me quittes, je te tue), ou bien encore d’une déclaration de guerre dans les conflits entre ethnies, pays ou cartels : les femmes sont le champ de bataille sur lequel les hommes marquent leur territoire. Mais c’est aussi là où les femmes résistent à l’accaparement de leurs terres, que la violence exercée contre elles est la plus forte, aboutissant aujourd’hui aux nouvelles chasses aux sorcières. Pour la chercheuse étatsunienne Silvia Federici : c’est avec la naissance de la modernité que les femmes doivent renoncer à la propriété de terres pour devenir la propriété des hommes.

    Quant à l’historienne Christelle Taraud, elle explique : “Le féminicide n’est jamais un acte spontané. Comme les génocides, ils font l’objet d’une très longue préparation. Il faut donc saisir le spectre de violences qui autorise des hommes à tuer. Pendant très longtemps, le féminicide restait impuni, donc ça acclimatait le droit du propriétaire.”

    Une série de 4 émissions exceptionnelles.
    Attention les faits relatés sont pour certains d’une violence extrème, et les témoignages plus qu’éprouvants.
    #patriarcat #féminicide

  • Derrière le succès de Blablacar, un contrat secret et des économies d’énergie surévaluées
    https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2024/04/06/derriere-le-succes-de-blablacar-un-contrat-secret-et-des-economies-d-energie


    Les locaux de Blablacar, à Paris, en septembre 2015. PATRICK KOVARIK / AFP

    L’entreprise de #covoiturage a engrangé plusieurs dizaines de millions d’euros depuis 2012 dans le cadre d’un mécanisme d’obligations environnementales approuvé par l’Etat. Une manne longtemps restée opaque, et qui s’appuie sur des calculs parfois fantaisistes.

    Pratique, écologique et même depuis peu rentable : #Blablacar, qui revendique plus de vingt millions d’inscrits en France, est érigé en modèle de start-up innovante. « Le leader mondial du covoiturage est Français : c’est une fierté ! », s’émerveillait Emmanuel Macron en 2022. Mais, pour en arriver là, la #start-up a profité d’un discret soutien avalisé par l’#Etat, à hauteur de plusieurs dizaines de millions d’euros par an, selon les informations du Monde. Une #rente opaque dont Blablacar a été le bénéficiaire quasi exclusif pendant une décennie et continue de profiter aujourd’hui.
    L’histoire remonte à 2012. La plate-forme, alors baptisée Covoiturage.fr, cherche encore son modèle économique après six ans d’existence. Une manne inespérée lui est alors proposée par un grand groupe français : Total.
    La compagnie, devenue depuis TotalEnergies, doit se conformer à une obligation environnementale imposée par l’Etat à tous les fournisseurs d’énergie. Le pétrolier doit financer chaque année un certain nombre d’actions favorisant la sobriété énergétique, dont l’efficacité est mesurée par des #certificats_d’économies_d’énergie (CEE). Ce système de #pollueur-payeur l’oblige à rechercher auprès de structures agréées par l’Etat des « gisements » de CEE potentiels, comme des travaux d’isolation, des installations de chaudières performantes, des dispositifs de fret ferroviaire…

    https://justpaste.it/c0ouj

    Tout ça pour des trajets couteux où sous la bienveillance obligée des « évaluations » la marchandisation règne.

    #voiture #entreprise #capitalisme_de_plateforme

  • Araser, creuser, terrasser : comment le béton façonne le monde, Nelo Magalhães
    https://www.terrestres.org/2024/04/05/araser-creuser-terrasser-comment-le-beton-faconne-le-monde

    Nos infrastructures pèsent un poids matériel et écologique dont nous n’avons pas idée. Ainsi, une autoroute contemporaine exige 30 tonnes de sable et gravier par mètre. Pour commencer à explorer cette histoire environnementale des grandes infrastructures, nous publions l’introduction du livre Accumuler du béton, tracer des routes.

    #livre #béton #infrastructures #autoroutes #écologie

    • Accumuler du béton, tracer des routes. Une histoire environnementale des #grandes_infrastructures

      Dans les décennies d’après-guerre, des milliers de kilomètres de routes et d’autoroutes sortent de terre pour soutenir l’intensification du trafic et relier, à travers les paysages agricoles remembrés, les métropoles aux zones industrielles, ports, aéroports, centrales électriques et complexes touristiques. C’est le début d’une « Grande accélération » qui bouleverse la production de l’espace. Sur les chantiers, le béton coule à flots tandis que le bruit des machines (qui ne font pas grève) a remplacé le tumulte des terrassiers. La chimie et l’industrialisation des techniques affranchissent la construction des contraintes du relief, du climat et de la géologie : « abstraire le sol » pour faire passer la route – et supporter le poids des camions – devient un leitmotiv de « l’aménagement du territoire » qui nécessite l’extraction et le déplacement continus de milliards de mètres cubes de terres, sable et granulat.

      Si les dégâts se font rapidement sentir dans le lit des rivières, les abords des carrières et dans l’atmosphère – sans parler de la mortalité sur les routes –, la frénésie du bitume n’a jamais faibli : il faut sans cesse réparer, épaissir, étendre cette infrastructure dévoreuse d’hectares et d’argent public. Ce livre offre une remarquable vue en coupe de cet engrenage technique, économique et politique. Alors que les luttes se multiplient contre le modèle routier et l’industrie cimentière, il identifie quelques verrous qui rendent le bâti si pesant. Un préalable pour penser des perspectives plus légères.

      https://lafabrique.fr/accumuler-du-beton-tracer-des-routes

      #sable #livre #Nelo_Magalhães #Nelo_Magalhaes

  • Le dérèglement climatique va « décimer les économies du G20 », avertit le chef de l’ONU Climat
    https://www.connaissancedesenergies.org/afp/le-dereglement-climatique-va-decimer-les-economies-du-g20-a

    AFP parue le 10 avr. 2024 - 15h46

    Le G20, divisé sur les questions géopolitiques, ne peut pas « reléguer au second plan » un dérèglement climatique qui « va décimer » leurs économies, a averti mercredi le chef de l’ONU Climat, plaidant pour un « nouvel accord » financier à même d’aider les pays en développement à lutter contre le réchauffement.

    Ces gens de l’ONU sont d’une malveillance. On en arriverait à être d’accord avec Israël et à conclure que l’ONU est un ennemi du monde libre et non faussé.

  • Biden says he’s ’considering’ wrapping up Julian Assange prosecution - Washington Times
    https://www.washingtontimes.com/news/2024/apr/10/biden-says-hes-considering-wrapping-up-julian-assa

    President Biden said Wednesday that his administration is mulling whether to end the prosecution of Julian Assange, the controversial WikiLeaks founder who is facing criminal charges for publishing thousands of confidential U.S. military records and diplomatic cables.

    #opportunisme_crasse mais #bonne_nouvelle potentielle malgré tout

  • A moins de 30 ans, leur corps déjà abîmé par le travail : « Ça a quelque chose de déprimant de se rendre compte qu’on est toute cassée si jeune »
    https://www.lemonde.fr/campus/article/2024/04/09/a-moins-de-30-ans-leur-corps-est-deja-abime-par-le-travail-ca-a-quelque-chos

    Des salons de coiffure aux entrepôts de logistique, de jeunes travailleurs et travailleuses racontent les douleurs physiques qui envahissent leur quotidien.

    Par Alice Raybaud
    Publié aujourd’hui à 06h15, modifié à 17h04

    Temps de Lecture 7 min.

    Article réservé aux abonnés

    Désormais, chaque matin, Léa Ruiz revêt tout un attirail. Positionner un masque FFP2 sur le visage, enfiler une paire de gants en latex. Sur son agenda personnel, toujours avoir un rendez-vous chez le kiné programmé à court ou moyen terme. A 32 ans, elle n’a pas le choix si elle veut alléger les troubles physiques qui pèsent sur elle après neuf années en tant que coiffeuse.

    Les premières douleurs sont survenues très tôt, dès ses périodes de stage. Dans les salons de grandes chaînes où la jeune apprentie coiffeuse officiait – debout toute la journée et soumise à une « cadence effrénée » –, son dos a commencé à lui faire mal. Puis ses poignets et ses épaules, à force d’enchaîner les Brushing coudes relevés et sèche-cheveux à la main, et enfin ses jambes, en raison du piétinement continu. « Au début, ça s’en allait, avec du sport ou des séances de kiné. Et puis ça s’est installé, et c’est devenu des douleurs constantes », raconte Léa Ruiz. A l’orée de la trentaine, un eczéma envahit ses mains, abîmées par les shampooings, suivi de violents maux de tête, liés à l’inhalation quotidienne des produits de décoloration.

    Depuis 2020, elle a quitté l’industrie des salons de coiffure « à la chaîne » et a monté une coopérative avec d’autres collègues, décidés à penser une organisation du travail plus respectueuse : Frange radicale, à Paris, où les coiffeurs essaient de prendre davantage leur temps pour chaque coupe. Mais la jeune femme traîne toujours ces séquelles physiques, qui s’aggravent d’année en année. « Je ne vois pas bien combien de temps je vais pouvoir encore tenir comme ça », confie-t-elle.

    « Usure prématurée »

    Dans de nombreux secteurs, en particulier peu qualifiés, des jeunes travailleurs et travailleuses subissent, avant même la trentaine, les impacts précoces de leur activité professionnelle. Des domaines comme la logistique, le BTP, la vente, la restauration, l’esthétique – souvent essentiellement soit féminins, soit masculins – sont marqués par un même turnover, symptomatique de milieux qui essorent les corps en un temps record.

    Si les métiers en question sont caractérisés par une pénibilité intrinsèque, les jeunes entrants sont particulièrement exposés à ce que les chercheurs appellent une « usure prématurée » en raison de la nature des emplois qui leur sont attribués. Souvent en intérim ou en CDD, ils passent en coup de vent, découvrant à chaque contrat un nouvel environnement de travail, auquel ils ne peuvent s’adapter pleinement. Et où on leur confie souvent les tâches les plus harassantes, dont les manutentions les plus lourdes et contraignantes, comme le souligne un rapport du Centre d’études de l’emploi et du travail de 2023.

    Marc (qui n’a pas souhaité donner son nom de famille), ajusteur-monteur de 25 ans, enchaîne depuis ses 19 ans les contrats d’intérim dans des usines d’automobile et d’aéronautique. Il a commencé par du travail de nuit, puis des horaires en trois-huit. « J’ai grandi dans une famille monoparentale, tout le temps avec des galères d’argent. Alors, quand j’ai vu qu’avec ce type d’emploi je pouvais toucher 2 000 euros plutôt que le smic, en tant que non-qualifié, j’ai dit oui direct. C’est un appât pour les jeunes comme moi qui cherchent à tout prix à sortir de la misère », raconte le jeune homme, passé auparavant par la vente et la restauration, « par défaut, après le refus de [ses] vœux d’études supérieures sur Parcoursup ».

    Mais avec ses horaires atypiques couplés au port de lourdes charges et un environnement de travail bruyant, il voit son corps – et son mental – s’écrouler. « C’est comme si j’étais constamment en retour de soirée, avec des difficultés à respirer, une arythmie cardiaque, l’impossibilité de trouver le sommeil. Ce rythme te détruit tout », explique Marc, qui souffre aujourd’hui de plus en plus d’une scoliose, et dont les bras et les poignets sont congestionnés à force des gestes répétés à l’usine.
    Douleurs et blessures

    Concernant en grande partie les plus jeunes, le travail de nuit aggrave tous les impacts physiques. « Certaines expositions, par exemple aux produits dangereux, font davantage de dégâts la nuit, car le corps ne les accueille pas de la même manière, et s’abîme plus vite et parfois de manière durable », observe le chercheur Serge Volkoff, spécialiste des relations entre l’âge, le travail et la santé.

    Plus d’un quart des 15-24 ans sont aussi contraints, à leurs débuts, à de l’emploi à temps partiel. « Or, ce recours au temps partiel les expose aux plus grandes pénibilités physiques et mentales », observe Anaïs Lehmann, doctorante en sociologie, qui rédige une thèse sur les travailleuses de la vente de prêt-à-porter. Dans ce secteur, le temps partiel est utilisé pour placer les jeunes aux moments de fortes affluences. « Des périodes où elles doivent soutenir une cadence élevée, debout, avec l’impossibilité de circuler correctement dans les rayons ou en réserve. Nombre d’entre elles se retrouvent avec des épaules bloquées, des douleurs aux pieds ou même des hernies discales », constate la chercheuse.

    Ces douleurs et blessures ont d’autant plus de probabilité de survenir que les jeunes connaissent moins, « du fait de leur inexpérience, les gestes de prudence, pour bien se positionner et éviter de se faire mal », constate Serge Volkoff. Si bien qu’ils se trouvent particulièrement exposés aux accidents graves et mortels au travail : trente-six travailleurs de moins de 25 ans n’ont pas survécu à un accident du travail en 2022, selon la Caisse nationale d’assurance-maladie.

    Leur statut précaire – de plus en plus fréquent et long en début de carrière – les installe aussi « dans une position de fragilité qui rend compliqué de s’opposer à leur employeur, ou d’user d’un droit de retrait quand ils se sentent mis en danger », ajoute Véronique Daubas-Letourneux, sociologue à l’Ecole des hautes études en santé publique. L’enjeu de s’extraire de cette précarité pousse d’ailleurs les jeunes à « mettre les bouchées doubles pour faire leurs preuves, sans pouvoir écouter les premiers signes de dégradation physique », pointe l’ergonome Jean-Michel Schweitzer.

    « Si tu ne vas pas assez vite, c’est simple, on ne te rappellera pas. Ça, tu l’as tout le temps en tête », témoigne ainsi Pierre Desprez, 26 ans, intérimaire pendant des années dans des entrepôts de logistique, où sa situation ne lui permettait pas de recourir aux gestes ou aux matériels de protection. « Quand tu as une cadence à respecter, tu ne peux pas toujours attendre ton binôme pour porter une charge lourde, alors tu t’y mets seul, quitte à t’esquinter le dos, explique le jeune homme, titulaire d’un CAP boulangerie et pâtisserie, secteur qu’il a quitté en raison d’une allergie à la farine, maladie fréquente chez les boulangers. En ouvrant des cartons, on s’entaillait aussi souvent les mains. Enfiler les gants de protection, puis les retirer, c’était prendre trop de retard. » Aujourd’hui ouvrier dans la métallurgie, Pierre connaît la même urgence, traduite désormais par des mains « pleines d’échardes de métal ».

    « Management du chiffre »

    Débuter dans ces secteurs, où la manutention est très présente, ou dans certains métiers d’artisanat signifie aussi devoir se plier à « une culture de l’effort et de la souffrance physique, raconte la coiffeuse Léa Ruiz. Plus tu vas te faire mal, plus ce sera dur, plus tu vas être valorisé ». La sociologue Diane Desprat, qui a étudié le milieu de la coiffure, a bien constaté que « toute manifestation de douleur chez l’apprentie ou la jeune salariée y est souvent pensée comme une manière d’apprendre le job, avec l’idée ancrée que le métier “rentre” par le corps ».

    Dans la restauration depuis ses 20 ans, Léa Le Chevrel se souvient, lors de ses débuts comme commis, s’être « usée le dos à porter des trucs super lourds, malgré [son] petit gabarit pour prouver qu’[elle] avai[t] [sa] place ». Aujourd’hui, le corps épuisé bien que toujours passionnée par le métier, « j’essaie de refuser de porter seule tel ou tel élément qu’on devrait soulever à deux, mais c’est mal vu. Tout comme le fait de prendre des arrêts maladie, tabou ultime de notre métier », explique la femme de 26 ans.

    Elle qui est passée par de nombreuses structures se rend compte que « bien des choses pourraient être faites de façon plus ergonomique, [s’il y] avait le matériel adapté, ou si seulement on se préoccupait de ce qui se passe dans les cuisines ». Mais « personne ne vient nous parler d’ergonomie et, quand on voit la médecine du travail, on nous rétorque que ces douleurs font partie du métier, que c’est normal », ajoute-t-elle.

    Bien souvent, ne pas être permanent dans les entreprises empêche aussi ces jeunes de bénéficier d’un suivi préventif. « Les directions se disent qu’avec le turnover élevé, ces jeunes ne restent pas longtemps, et donc qu’elles n’ont pas besoin de se préoccuper de leur ergonomie sur le long terme… sans comprendre que c’est aussi cette pénibilité qui renforce le phénomène de turnover », souligne la chercheuse Anaïs Lehmann.

    « Même en école, on n’a toujours pas beaucoup de cours [de prévention], remarque Lou-Jeanne Laffougere, apprentie paysagiste de 18 ans, qui souffre déjà du dos et des bras. On se débrouille un peu seuls pour trouver les bons gestes. » Cependant, Serge Volkoff observe que, même si la France est toujours « la mauvaise élève européenne en termes de pénibilité », le sujet de l’usure prématurée commence à être pris en compte : « Aujourd’hui, des employeurs font vraiment des efforts, des services de santé au travail arrivent à être proactifs sur ces enjeux. Ce qui n’est pas toujours simple, car économiser les plus jeunes sur les tâches les plus pénibles, par exemple, veut aussi dire moins préserver les anciens. »
    Lire aussi l’enquête : Article réservé à nos abonnés Face à l’intensification du travail, les jeunes plongent dans un malaise profond : « Je m’enfonçais dans le travail, je n’avais plus de distance »

    A cela s’ajoute un autre phénomène : les jeunes débutent dans un marché du travail aujourd’hui marqué par une forte intensification, guidée par un « management du chiffre », qui éreinte encore davantage les corps. A 18 ans, Cloé commence sa vie professionnelle dans des chaînes low cost d’esthétique. « Il y avait une pression du “toujours plus” : c’était du travail à la chaîne, de l’abattage, où la cliente, qui vient sans rendez-vous, est reine. Avec ce rythme, impossible de bien se positionner pour s’économiser, se souvient la Toulousaine de 26 ans. Toutes mes vacances étaient dédiées à me remettre physiquement, je ne pouvais même plus aller faire du VTT avec les copains. »
    Incidences morales

    Bien vite, les conséquences physiques envahissent le quotidien, des douleurs chroniques aux séquelles liées à des accidents du travail. Le coût n’est pas uniquement physique. Léa Le Chevrel investit une partie substantielle de son salaire dans de l’ostéopathie, des massages, du yoga, ou encore de la literie haut de gamme, « pas par confort, mais par nécessité ».

    Les incidences sont aussi morales. « Ça a quelque chose de déprimant de se rendre compte qu’on est déjà toute cassée si jeune », confie Léa Ruiz qui, comme toutes les personnes interrogées, peine à imaginer un horizon professionnel. La sociologue Anaïs Lehmann ajoute : « Les jeunes de mon enquête rapportent que cette pénibilité et ses conséquences en viennent à générer des conflits conjugaux, des tensions personnelles. Mais sans savoir comment trouver une échappatoire, en raison de leur faible niveau de diplôme. »

    Le jeune ouvrier Marc, à bout, cherche à quitter ce secteur trop pénible, bien que ce soit « difficile avec seulement un niveau bac ». Il envisage malgré tout de se lancer dans une formation certifiante pour trouver un emploi de bureau, idéalement dans l’informatique. Sans perspective pour accéder à un emploi moins éreintant, Pierre Desprez, lui, dit éviter de se projeter dans l’avenir : « Parce que, honnêtement, ça me fait trop peur. »

    Alice Raybaud

  • Retour sur les actions et événements contre STMicro et le complexe techno-militaro-industriel grenoblois
    https://ricochets.cc/Retour-sur-les-actions-et-evenements-contre-STMicro-et-le-complexe-techno-

    Retour sur le gros week-end d’actions et mobilisations à Grenoble et Crolles contre STMicro et le néfaste complexe techno-militaro-industriel grenoblois qui l’a enfantée. Rapide retour sur la mobilisation d’avril 2024 - Depuis la création du collectif STopMicro, la contestation des usines de la microélectronique grenobloise s’intensifie et se diversifie. Ce week-end de mobilisation des 5, 6, 7 et 8 avril 2024 marque une nouvelle étape dans la lutte. Rapide retour sur quatre journées contre (...) #Les_Articles

    / #Résistances_au_capitalisme_et_à_la_civilisation_industrielle, #Technologie, #Guerres

    https://stopmicro38.noblogs.org/post/2024/04/08/rapide-retour-sur-la-mobilisation-davril-2024
    https://stopmicro38.noblogs.org/post/2024/04/08/blocage-de-la-presquile-scientifique-le-temps-perdu-pour-la-rec
    https://www.placegrenet.fr/2024/04/06/de-leau-pas-des-puces-850-a-2-000-manifestants-contre-la-microelectronique-jusqua-la-presquile-scientifique-de-grenoble/627571
    https://lundi.am/De-Grenoble-a-Tel-Aviv

  • Pourquoi « la naissance des divinités au néolithique est liée à la domestication des plantes au Proche-Orient »
    https://www.lemonde.fr/le-monde-des-religions/article/2024/04/07/pourquoi-la-naissance-des-divinites-au-neolithique-est-liee-a-la-domesticati

    Notre monde contemporain n’appréhende la technique qu’à l’aune de son application, d’où une approche biaisée de son origine. Or, les grandes innovations techniques sont trop complexes pour pouvoir envisager leur application dès le début.

    Les premiers développements sont en réalité le fruit d’une volonté d’explorer un phénomène fascinant, dont l’irruption interpelle les conceptions du monde et du cosmos – ainsi de la poudre à canon inventée par des alchimistes chinois fascinés par le souffle de l’explosion.

    Le concept de « technopoïèse », que j’ai récemment proposé, désigne cette phase originelle dans laquelle le processus revêt plus d’importance que le produit qui en est issu. Par la suite, dans la phase technologique qui lui succède, le produit fini se détache du processus. Devenue autonome, sa production peut se voir guidée par des critères utilitaires.

    Les trois millénaires d’extension du processus de domestication des plantes au Proche-Orient correspondent précisément à une phase de technopoïèse, dans laquelle les plantes sont mises en culture au nom de la résonance cosmique du processus, et non pas en vue de leur consommation. J’affirme donc que c’est cette dimension cosmique qui deviendra le moteur du processus de domestication.

    #agriculture #histoire #archéologie #technique #technopoïèse #spiritualité #utilitarisme #Nissim_Amzallag #livre

  • Les salariés de Tefal contre une interdiction des PFAS.

    « Touche pas à ma poêle » : les salariés de Tefal contre une interdiction des PFAS. Plusieurs centaines de salariés du groupe SEB se sont rassemblés devant l’Assemblée nationale, le 3 avril, pour protester contre l’interdiction possible des polluants éternels.
    (...)
    À en croire certains employés, ce virage [abandonner les PFAS] pourrait cependant être complexe. 90 % des poêles produites par Tefal contiennent du PTFE, signale Christian Genton, délégué syndical central CFE-CGC sur le site de Rumilly. Et 70 % de cette même production est exportée vers le Japon, l’Allemagne, la Pologne ou le Portugal, qui autorisent encore les produits contenant des PTFE.

    https://reporterre.net/Touche-pas-a-ma-poele-les-salaries-de-Tefal-contre-une-interdiction-des-

    Robert Kurz :

    Il y a d’une part les intérêts fondamentaux (matériels, sociaux et culturels) des hommes, et qui correspondent à leurs besoins historiques. Mais, d’autre part, ce contenu est lié à la forme capitaliste. Ainsi, le contenu réel des besoins apparaît comme secondaire, seul l’intérêt capitalistiquement constitué sous sa forme-argent (salaire et profit) est perçu directement. Il est inévitable que l’on essaie de faire valoir les vrais besoins ou les intérêts fondamentaux d’abord sous la forme capitaliste dominante. Mais quand on ne voit plus la différence entre le contenu et la forme, cet intérêt se retourne contre ses porteurs. Ceux-ci feront alors dépendre leurs intérêts, qu’ils le veuillent ou non, du fait que la valorisation du capital fonctionne. Ils se transforment ainsi eux-mêmes en un « sujet objectif » qui soumet sa vie aux lois du capital et pour qui cette soumission est normale.

    (...)

    Les syndicats sont désormais habitués non pas à fonder leurs revendications sur les besoins de leurs membres, mais à présenter ces besoins comme une contribution à la meilleure marche du système. Ainsi, on prétend que des salaires plus élevés sont nécessaires pour consolider la conjoncture et qu’ils sont possibles parce que le capital engrange des superbénéfices. Mais lorsqu’il devient manifeste que la valorisation du capital s’immobilise, cette attitude mène au renoncement volontaire et à la cogestion de la crise dans l’ « intérêt supérieur » de l’économie d’entreprise, des lois du marché, de la Nation, etc. Cette fausse conscience existe non seulement chez les bureaucrates, mais aussi dans ce que l’on appelle la base.

    http://palim-psao.over-blog.fr/article-theorie-de-marx-crise-et-depassement-du-capitalisme-a-p

    #critique-de-la-valeur #pfas

    • Ça me rappelle le soutien de la CGT aux grèves dans les usines d’armement françaises … j’en ai un peu marre parfois de bouffer des patates parce qu’un jour j’ai fait certains choix de vie, notamment de ne jamais bosser pour la chimie, le nucléaire, l’armée ou la pub, bon, y reste pas grand chose après ça, mais merde j’en connais un paquet de gens qui ont renoncé au fric et au confort pour défendre leurs idées généreuses, et évidemment c’est pas facile tout les jours de tenir la barre à contre courant. Mais du coup j’avoue que je prends la haine de voir des personnes tellement abruties dans leur vie aller jusqu’à défendre leur petite place même si leur taf est toxique, dangereux et merdique pour le monde entier et que leurs patrons sont des grosses pourritures qui les exploitent sans vergogne.

    • dans l’article de Reporterre :

      Sophie Binet, a elle aussi pris position en ce sens dans les colonnes de L’Humanité, arguant que les besoins humains et la planète devaient « primer » sur les intérêts économiques et financiers, et que des alternatives pouvaient être trouvées.

      Des alternatives à la société marchande ?

    • Car ce qui est remarquable c’est que la critique écologiste et de gauche (qui n’a pas lu Kurz) partage avec les salariés pollueurs la même défense de la société marchande. Ils n’en démordent pas : il y des alternatives à l’emploi, on peut maintenir l’activité économique, créer des emplois, etc.

      Je ne sais pas quel discours est le plus choquant à la fin.

      Accessoirement, le PTFE ne se trouvent pas que dans les poêles. https://fr.wikipedia.org/wiki/Polyt%C3%A9trafluoro%C3%A9thyl%C3%A8ne
      Et si l’on parle de l’ensemble des fluoropolymères c’est encore pire... « Touche pas à mon vélo électrique » ?

      Si on a mis des PFAS partout, c’est parce que c’est pratique et pas cher. Cela le député écolo, et tous ceux qui s’intéressent aux PFAS, le savent parfaitement. Par contre, à un moment, faut conclure et arrêter de faire le béta en disant qu’il y a des « alternatives » aux PFAS... dans une société marchande. Car dans une société marchande, renoncer à des produits pratiques et pas chers, c’est pas possible.

      Les écolos ne comprennent pas que les acteurs économiques sont englués dans cette société marchande, ce n’est pas une affaire de conscience et de bonne volonté. Donc le discours écolo ne peut passer et contribue à la crispation sociale générale. Si c’est le cas, c’est que faute de critiquer la société marchande et ce qu’elle nous impose, ils critiquent finalement les comportements des autres en tant qu’ils relèveraient de choix.

      S’attaquer par le petit bout de la lorgnette aux pollutions, au cas par cas, sans s’interroger sur les causes globales, en ne traitant que les problèmes que sous le prisme de la « volonté politique », voilà ce que font les écolos, qui sont devenus les nouveaux syndicalistes du monde contemporain, participant à la cogestion de la crise dans l’intérêt supérieur de la société marchande.

  • Ecole privée : un rapport relance le débat politique, pas encore la « guerre scolaire » | Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/ecole-privee-un-rapport-relance-debat-politique-guerre/00110247

    Budgets opaques, manque de contrôle, ségrégation sociale et scolaire malgré un financement majoritairement public : un rapport parlementaire étrille l’enseignement privé et sa gestion par l’Etat, et propose des réformes.

    https://justpaste.it/a7ag8

  • Groupes de niveau : les profs en grève contre le tri scolaire | Alternatives Economiques
    https://www.alternatives-economiques.fr/groupes-de-niveau-profs-greve-contre-tri-scolaire/00110217

    La mise en place de groupes de niveau et la transformation du brevet mettent à mal le collège unique. Une rupture historique qui remet en cause les acquis des politiques publiques éducatives depuis un demi-siècle.

    https://justpaste.it/3f3tc

  • La baignade est impossible dans la Seine depuis septembre en raison de bactéries, selon des analyses de l’ONG Surfrider Fondation.

    À 108 jours du début des Jeux olympiques de Paris, une nouvelle étude menée par l’ONG Surfrider Fondation, consultée par France Inter, révèle que la Seine n’est toujours pas adaptée à la baignade. Plusieurs prélèvements réalisés à Paris depuis septembre 2023 indiquent la présence de plusieurs bactéries à des niveaux qui dépassent les normes fixées par la Fédération internationale de natation.

    Ils ont l’air malins tous les ravis de la crèche, Hidalgo, Macron, Le Monde, Libération, Brut, qui rivalisent dans le déni à qui mieux mieux et relaient en boucle les mensonges extravagants diffusés depuis dix ans autour de ce qui demeurera comme un cas d’école de la manipulation de l’information.

    (…)

    https://www.eauxglacees.com/La-baignade-est-impossible-dans-la-Seine-depuis-septembre-en-raison-de?

  • Faire payer les rendez-vous non honorés : l’avis des médecins
    https://www.slate.fr/story/235324/faire-payer-rendez-vous-manques-non-honores-avis-medecins-consultation-medical

    ... certaines personnes ne sont pas en mesure de venir à tous leurs rendez-vous médicaux et (...) se retrouvent souvent dans l’incapacité de prévenir. « Mes patients ont 75 ans de moyenne d’âge. Ils ont fait un AVC, plus de 30% ont des troubles de la planification, 25% ont des troubles moteurs séquellaires. Ils ont de multiples suivis parallèles. C’est très compliqué d’honorer des rendez-vous dans ces conditions. C’est d’autant plus compliqué que leur accès aux SMS de rappel peut être difficile, que les politiques de réduction des coûts en matière de secrétariat dans les hôpitaux et cliniques les rend quasi injoignables pour annuler ou déplacer des rendez-vous », assure sur Twitter R., neurologue.

    « Une partie de la patientèle, déjà marginalisée, a des difficultés –à cause par exemple d’addictions ou de troubles cognitifs– à honorer systématiquement les rendez-vous », atteste Yannick, médecin généraliste avec lequel nous avons échangé.

    Ces éléments vont dans le sens d’une étude irlandaise publiée en 2019, qui écrit dans sa conclusion : « Les patients souffrant d’un plus grand nombre d’affections de longue durée ont un risque accru de manquer des rendez-vous en médecine générale malgré le contrôle du nombre de rendez-vous pris. Ceci est particulièrement vrai chez les patients souffrant de troubles mentaux. » Elle indique également que ces patients « qui manquaient plus de deux rendez-vous par an ont un risque de mortalité toutes causes confondues plus de huit fois supérieur à ceux qui ne manquaient aucun rendez-vous. Ces patients sont décédés prématurément, généralement de facteurs externes non naturels tels que le suicide. »

    #Santé #médecine #rendez_vous_non_honorés #taxe-lapin #darwinisme_social

    • Il compte financer comment sa « punition 5 euros » le premier de la classe ? Comment il compte récupérer mes 5 euros si je n’ai pas honoré mon rdv ? J’ai beau réfléchir TOUT est payant !!! Tout système de récupération a un coût !

    • Il peuvent récupérer la thune comme ils le font déjà avec le forfait médicament où même des pauvres doivent contribuer à hauteur de 50 balles par an de leurs poches sur des médocs qui auraient pu leur être fournis sans frais (CSS) ou remboursés. Il suffit de modifier quelques critères Cpam, pas besoin de frais de recouvrement qui pourraient s’avérer supérieurs aux sommes en jeu.

    • « Une partie de la patientèle, déjà marginalisée, a des difficultés –à cause par exemple d’addictions ou de troubles cognitifs– à honorer systématiquement les rendez-vous. » === Et oui, la non observance des rendez-vous ou des traitements fait souvent partie du problème de santé d’où la nécessité de différents seuils d’accès aux soins !

    • Ce qui est rageant, c’est qu’en même temps, les médecins et personnels soignants sont en surbooking. Donc, en général, dans mon entourage, les lapins sont vus comme des soupapes qui permettent de souffler, de rattraper du retard ou de prendre plus de temps avec un autre patient.... Cette logique comptable est absurde et pose vraiment des problèmes aux plus précaires : 5€ c’est beaucoup d’argent. C’est pareil en effet @colporteur avec les médicaments. Ou comment faire porter sur les plus précaires la gabébie libérale, encore une fois et toujours.

    • « Taxe lapin » : le patron de Doctolib opposé à l’empreinte de carte bancaire obligatoire avant le rendez-vous
      https://www.lemonde.fr/societe/article/2024/04/10/taxe-lapin-le-patron-de-doctolib-oppose-a-l-empreinte-de-carte-bancaire-obli

      « Il y a 15 % des patients qui sont en situation d’illectronisme » et « 5 % qui n’ont pas de carte bancaire. C’est impensable d’entraver l’accès aux soins pour eux », a justifié son PDG, pourtant favorable au principe d’une taxe pour rendez-vous médicaux non honorés.

      Sur le fond, Doctolib est favorable à la mise en place d’une « taxe lapin » de 5 euros, que le premier ministre, Gabriel Attal, a appelée de ses vœux samedi afin de limiter les rendez-vous médicaux non honorés. Mais, concrètement, comment faire payer cette somme au patient fautif ? Pour l’exécutif, la pénalité devrait être retenue grâce à l’empreinte de carte bancaire prise par les plates-formes de rendez-vous, et les médecins pourront l’appliquer, ou pas. Une solution à laquelle s’oppose Stanislas Niox-Chateau, président-directeur général de Doctolib.

      « Il ne faut pas créer un fardeau administratif nouveau pour les soignants et entraver l’accès aux soins », a jugé M. Niox-Chateau, interrogé par France Inter, mercredi 10 avril. « Il y a 15 % des patients qui sont en situation d’illectronisme [qui n’ont pas Internet ou qui ne savent pas l’utiliser] et 5 % qui n’ont pas de carte bancaire. C’est impensable d’entraver l’accès aux soins pour eux », a encore justifié le patron de Doctolib.

      M. Niox-Chateau pointe également le problème des rendez-vous qui ne sont pas pris en ligne. Selon lui, c’est à l’Assurance-maladie que revient la charge de gérer cette « taxe lapin », en prélevant les 5 euros sur le rendez-vous suivant du patient.

      Erreur lors de mon post précédent, donc. Je croyais que, comme pour les médicaments, le fric taxé aux patients le serait sous forme de non remboursement. Or il s’avère qu’il s’agirait de faire payer le rendez-vous raté, et ce, directement au praticien concerné.

    • C’est la suite de la grande in-quisi-fantilisation des problèmes sociaux et politiques. Les boucs émissaires sont désignés : les pauvres sont responsables du ralentissement de la rotation de la terre. De fait, ils ont le devoir de continuer à courber leur maigre échine pour faire peur aux bourgeois, et pour ce gouvernement, d’être reconnaissants à la nation de les maltraiter. Leur devoir est de mettre au service de la croissance nationale leur énergie, leurs ovaires, leurs spermes, leurs enfants (pour l’armée), leurs muscles et leur porte monnaie dont le contenu est à vider dans les hypersuperextramarchés, sans oublier de verser leur dîme mensuelle aux saigneurs propriétaires de l’eau, l’électricité, du gaz, des autoroutes et de leur logement.
      Bientôt le fouet en place publique pour 3 retards chez le dentiste. Tout ça pour que certains s’offrent une deuxième piscine.

    • « Une enquête de l’URPS datant de 2012 soulignait déjà que plus de la moitié (60%) de ces rendez-vous manqués sont le fait de malades en tiers payant, essentiellement titulaires de la #CMU [ancien nom de la Complémentaire santé solidaire, ndlr]. Mais on ne s’interroge jamais sur pourquoi ces patients manquent leurs rendez-vous. Alors, l’auteur de la thèse a appelé les patients qui n’étaient pas venus à leur rendez-vous sur deux semaines à la maison de santé. Ils étaient en tout 54. Sur les 22 avec lesquels il a été possible de mener un entretien téléphonique, aucun n’a dit qu’il se fichait d’honorer ou non un rendez-vous et tous ont accepté le nouveau rendez-vous qui leur a été proposé. En revanche, tous avaient une bonne raison qui touchait justement à leur statut précaire, comme un rendez-vous imprévu à la CAF, des changements d’horaire de travail à la dernière minute ou bien encore un enfant à garder. »

      un extrait de l’article initial

  • Contre la criminalisation et la #Surveillance des militant·es politiques
    https://www.laquadrature.net/2024/04/08/contre-la-criminalisation-et-la-surveillance-des-militant%c2%b7es-poli

    Ce texte a été lu par un·e membre de La Quadrature du Net le 5 avril 2024 lors du rassemblement devant le Tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence, à l’occasion des deux nouvelles mises en examen dans l’affaire…

  • Les ruptures de contrat en formation par apprentissage : l’hécatombe ! Une contribution de Christian Sauce | ESS, Emploi, Formation, Insertion et bien d’autres choses. | Michel Abhervé | Les blogs d’Alternatives Économiques
    https://blogs.alternatives-economiques.fr/abherve/2024/04/08/les-ruptures-de-contrat-en-formation-par-apprentissag

    Quelle ne fut donc pas ma surprise de découvrir en février 2024 que la Dares retrouvait le chemin de la raison en publiant à nouveau les taux de ruptures des contrats commencés en 2020 ! Force est de constater que la situation ne s’est pas améliorée : 38 % des contrats d’une durée prévue d’environ deux ans ont été rompus (dont 27,3 % la première année). Ce qui correspond à plusieurs centaines de milliers de ruptures par an ! Une hécatombe au regard des 10 % d’élèves de lycées professionnels qui décrochent chaque année et dont on fait toute une montagne ! Qui est informé de cela ? Qui le sait parmi les parents et les jeunes “clients” de l’apprentissage, appâtés chaque jour par les boniments des libéraux ?? Et est-ce acceptable que la France dépense autant de milliards d’euros d’argent public, sans aucun contrôle, pour un système de formation privé qui génère autant de souffrances chez nos adolescents et jeunes adultes ?

  • La tour Insee à Malakoff : anachronie d’une chute - AOC media
    https://aoc.media/analyse/2024/04/07/la-tour-insee-a-malakoff-anachronie-dune-chute

    Par Vanille Busin, Nicola Delon et Jérôme Denis
    Designer Ingénieure , Architecte, Sociologue
    Les auteurs de l’étude qui a conclu à la pertinence de la démolition de la célèbre tour Insee de Malakoff auraient été bien inspirés de suivre le conseil de méthode des grands statisticiens de ladite maison : la quantification du monde ne peut s’apprécier, et se discuter, qu’à condition de pouvoir interroger les opérations conventionnelles qui en sont le fondement. Et la tour serait toujours debout.

    « Mesurer pour comprendre », tel est le slogan de l’Institut National de la Statistique et des Études Économiques (INSEE) qui, entre 1975 et 2018, fut hébergé dans une tour tripode de 48 mètres de haut située au bord du périphérique parisien à Malakoff. Plusieurs générations de statisticiens et d’économistes hétérodoxes ou orthodoxes se sont succédé dans ces bureaux, et leurs régulières publications d’indicateurs ont eu des effets considérables sur les politiques publiques des 50 dernières années.

    En ce début de printemps 2024, les 32 000 m² de l’édifice dessiné par les architectes Denis Honegger et Serge Lana sont minutieusement grignotés par les machines des démolisseurs qui poursuivent leur radical effacement. En lieu et place, il est prévu d’y installer un nouvel immeuble de bureaux de 35 000 m² pour accueillir l’administration centrale des ministères du Travail, de la Santé et des Solidarités.

    Les alertes citoyennes, en premier lieu celles de l’association IN C’ Malakoff, les oppositions d’élu·es dont Jacqueline Belhomme, maire de Malakoff ou Carine Petit, maire du 14ème arrondissement limitrophe, les tribunes, pétitions, réunions publiques, la déclaration de Chaillot, et même le tout récent avis défavorable de l’enquête publique : rien ne semble pouvoir arrêter cette destruction irréversible. Celle-ci cristallise en réalité un ensemble de mécanismes et de forces à l’œuvre.

    En y regardant de plus près, il apparaît même que ce cas particulier nous raconte l’époque. Le scénario de la démolition-reconstruction qui pouvait sembler pour certains une évidence il y a dix ans à peine a été balayé par une autre évidence diamétralement opposée, celle de la conservation-réhabilitation. Que nous raconte ce renversement ? Que dit-il du processus de fabrication de l’architecture et du rôle de ses acteurs politiques et économiques ? Que dit-il des indicateurs utilisés pour prendre des décisions et de notre rapport au temps ?

    Cette situation nous confronte en effet à une complexe discordance des temps : le temps court d’une prise de décision politique obéissant à un moment particulier, le temps long de la ville qui se structure par un effet différé de ces décisions, le temps actualisé dans un nouveau contexte climatique qui nous impose, « dans l’urgence », de maintenir nos bâtiments le plus longtemps possible, et enfin le temps qu’il nous manque pour faire cesser ce projet qui ne fait plus sens.

    Pour ou contre la démolition ?
    Pour les promoteurs publics de la démolition le choix de regroupement des ministères sur un même site s’explique par plusieurs arguments : programmatique, pour « faciliter le travail en commun entre les services, qui génère aujourd’hui de nombreux déplacements sources d’émissions de gaz à effet de serre » ; écologique, « les immeubles loués actuellement n’atteignant pas totalement le niveau d’exigence en matière de consommation énergétique » ; financier, « le coût des baux locatifs des deux sites actuels étant très onéreux et difficilement acceptable dans un contexte d’économie budgétaire ». La construction d’un bâtiment neuf est justifiée par la nécessité de répondre « aux besoins fonctionnels des services administratifs, en créant des espaces adaptables et une volumétrie permettant d’améliorer la fonctionnalité et l’efficience du travail collectif ». Il permettra d’offrir des espaces de travail « modernes, accueillants et accessibles, en adéquation avec les standards d’aujourd’hui et de demain pour la qualité de vie au travail ».

    Si l’option de la réhabilitation de la tour a été étudiée dans un premier temps, cette piste n’a pas été retenue car elle ne répondait pas « aux ambitions de l’État vis-à-vis des besoins fonctionnels et des objectifs en matière d’énergie et de bilan carbone », le bilan énergétique d’exploitation de la tour INSEE étant moins performant que celui d’une construction neuve. Le nouveau bâtiment promet d’être « exemplaire en matière de respect des politiques d’économies d’énergie, de développement durable et de mobilité »[1] et répondra aux exigences du référentiel NF HQE Bâtiment Durable 2016 ainsi qu’à la Réglementation Environnementale 2023.

    Mais a-t-on vraiment pris la mesure du potentiel de la réhabilitation ? Pour les opposants à la démolition, la destruction du tripode de béton armé représente « un gigantesque gâchis environnemental, financier et patrimonial » pour un usage identique et sur une surface similaire. Ils démontrent que la transformation de la tour aurait pu répondre à moindre coût au programme et à l’ambition des ministères. D’un point de vue architectural, la typologie du tripode est reconnue pour ses grandes qualités : « son orientation multiple offre des espaces ensoleillés, car aucune façade n’est à l’ombre toute la journée » ; elle permet « l’économie des circulations verticales, concentrées en un point central » ; « la structure poteaux-poutre régulière offre un plan libre, permettant d’imaginer une diversité de configurations et d’usages ».

    Plus frappant, l’étude comparative multicritères de l’État finalement rendue publique en 2022 par Alterea, confirme la possibilité technique d’une réhabilitation et sa pertinence, tant du point de vue environnemental que financier. Ce scénario coûterait « 25 à 52 millions d’euros de moins », soit « 15% à 30% d’économie tout en émettant près de 30% de carbone en moins ». Même en prenant en compte la performance environnementale du bâtiment neuf, « les émissions de CO2 du chantier de démolition-reconstruction sont tellement importantes qu’il faudrait attendre près de 430 années d’exploitation du bâtiment pour les amortir et rentrer dans une phase plus vertueuse que si le bâtiment avait été rénové initialement »[2].

    Interroger les critères
    Pour comprendre ce qui motive les conclusions de cette dernière étude, qui confirme malgré tout la pertinence du projet de démolition-reconstruction, il faut se pencher plus précisément sur sa méthode, et le principe même de l’analyse multicritères. C’est d’ailleurs ce à quoi les grands statisticiens et économistes de l’INSEE appelaient en leur temps, d’Alain Desrosières à François Eymard-Duvernay, à propos de toute forme de mesure : la quantification du monde ne peut s’apprécier, et se discuter, qu’à condition de pouvoir interroger les opérations conventionnelles qui en sont le fondement, en particulier celles qui consistent à produire des équivalences. Autrement dit, il ne faut pas seulement se pencher sur le résultat des calculs, mais questionner en amont leurs postulats et leur périmètre. On est de ce point vue frappés de voir une série de variables très différentes compilées dans des tableaux autour de critères aux intitulés eux-mêmes discutables et rendus commensurables : « patrimonial, architectural et paysager », « fonctionnel », « organisationnel », « environnemental », et bien sûr « économique ». Critères qui, au fil du document, servent à comparer les scénarios (dont plusieurs modalités de réhabilitation), d’abord sous la forme de sous-critères chiffrés, puis de courtes phrases, de l’usage des couleurs rouge et verte, et enfin de… smileys.

    Plusieurs formes d’aplatissement se jouent dans ce dispositif. La première porte sur le sens même de la comparaison, son orientation. L’étude est en effet organisée autour de l’évidence de la démolition, et c’est à l’aune de ce scénario que les autres sont mesurés. Ce seul point de référence témoigne d’une organisation du raisonnement calculatoire qui n’a rien « d’innocent », comme le dirait la philosophe Donna Haraway[3].

    L’effet d’aplatissement se joue aussi dans l’opération technique de la comparaison, ou plutôt des comparaisons accumulées. Qu’est-ce qui est compté, exactement, et qu’est-ce qui ne l’est pas ? De quel droit se permet-on par exemple d’opposer des bilans d’émissions carbone d’opérations, à propos desquelles on peut considérer qu’elles ne sont pas vraiment comparables, notamment parce que la question de la matière est occultée dans le calcul ? En particulier, la durée nécessaire à la constitution des matériaux qui entrent dans la fabrication du béton n’est pas comptée. Ainsi, une grande partie du coût des matériaux est cachée, alors même que ce coût deviendrait inestimable si l’on considérait le sable pour ce qu’il est « réellement » : une ressource non renouvelable. Ailleurs, les émissions carbone du scénario démolition-construction sont compensées uniquement si l’on compte une exploitation du bâtiment neuf sur plus de quatre siècles, alors même que nous n’avons pas 100 ans de recul sur la durée de vie du béton.

    L’aplatissement de la méthode se joue enfin dans le choix des critères et dans la distribution de l’expertise. Alors même que les membres de l’association de défense de la conservation IN C’ Malakoff font preuve d’une remarquable maîtrise du sujet, y compris sur le plan technique, leur parole est restée inaudible face à des décideurs qui font la sourde oreille. À l’heure de la crise climatique et de la défiance grandissante vis-à-vis des autorités politiques et scientifiques, cultiver les conditions d’une démocratie technique est essentiel, en particulier lorsqu’il s’agit d’architecture et d’urbanisme. Une démocratie qui ne consiste pas simplement à rendre acceptables des projets décidés à huis clos, mais au contraire à rendre discutables leurs aspects les plus techniques, qui sont toujours aussi éminemment politiques.

    C’est dans le débat collectif autour des chiffres et des critères que peut s’inventer une échappatoire à l’aplatissement indiscutable des calculs. En reconnaissant que les projets de ce genre ne sont pas seulement affaire de « coûts » et de « bénéfices » dont l’identification tiendrait d’un bon sens partagé, mais qu’ils relèvent de la décision politique. Il faudrait ainsi pouvoir accompagner une « inversion du pensable », pour reprendre la belle expression de Michel de Certeau[4], qui ferait s’imposer l’évitement de la démolition, la prise en compte des cycles longs de la matière, une véritable considération pour les sols et leurs richesses comme autant de points de départ, autant de nouvelles évidences à partir desquelles penser, aménager et ménager.

    Le fait accompli de la disparition
    C’est tout le contraire qui s’est passé à Malakoff à propos de la tour de l’INSEE. Pendant les premières années du projet, c’est la destruction qui a tenu lieu d’évidence. Comme si le bâtiment avait déjà disparu, gommé par la projection d’un futur qui tenait sa force d’une parcelle devenue page blanche. Puis tout est allé très vite. Les travaux de dépollution ont commencé et l’évidence s’est concrétisée dans les premières opérations, dont le coût a pu être comptabilisé dans l’étude multicritères, pesant ainsi en défaveur des autres scénarios, et rendant particulièrement difficile l’élaboration d’alternatives. Cette politique du fait accompli a fait de la réhabilitation une sorte d’incongruité dont la pertinence est devenue de plus en plus complexe à démontrer. Cette difficulté à vouloir arrêter le coup parti est par ailleurs renforcée par le choix de la procédure du marché public initial. En effet dans le cadre d’un « Marché Global de Performance » le commanditaire public confie à un acteur privé, ici Eiffage, la conception, la construction et la maintenance du bâtiment. Toute redirection au cours du processus est rendue quasiment impossible ou très coûteuse au regard des clauses contractuelles initiales.

    La force des évidences tient précisément à ce qu’on ne les voit plus, qu’elles se fondent dans l’arrière-plan de l’expérience. Aujourd’hui, malgré toutes les tentatives citoyennes et juridiques, la tour est en train d’être rasée. Et la manière même dont s’opère la démolition redouble la politique du fait accompli de la disparition. Depuis plusieurs semaines, étage par étage, la tour est effacée, sans fracas, presque silencieusement. Il y a quelque chose de l’anesthésie collective qui se joue dans ce démontage progressif « sans douleur », si loin des explosions spectaculaires qui avaient le mérite d’assumer la violence matérielle et symbolique de la démolition. Il faudrait rester jour et nuit sur le site pour véritablement prendre la mesure de celle-ci. Dessiner des lignes dans le ciel comme on trace un trait sur une bouteille dont on soupçonne que son contenu disparaît à notre insu. Suivre aussi la masse considérable des matériaux qui résulte de cet acte de démolition, et qu’il faut bien transporter, entreposer, retraiter dans le meilleur des cas. Documenter aussi les résidus toxiques récupérés à cette occasion, au premier rang desquels l’amiante. Accompagner, enfin, les ouvriers dont les corps portent aussi les traces de cet effacement.

    Mais déjà, la tour n’est presque plus là. Que restera-t-il dans quelques semaines, dans quelques années ? Comment son absence sera-t-elle éprouvée alors même que son existence n’a pas été jugée digne de considération et que sa démolition est passée inaperçue ?

    Le projet installe les conditions d’une grave amnésie, qui s’étend au-delà de la question strictement patrimoniale. Il perpétue un monde où le rapport aux milieux habités est marqué par l’insensibilité, voire l’insouciance. Un monde où le confort et l’innovation ont été associés à la course au remplacement et à la mise en invisibilité systématique des déchets qu’elle génère[5]. Un monde où l’inattention matérielle et l’oubli sont inscrits au cœur de l’idée de progrès, dont nous sommes de plus en plus nombreu·ses·x à savoir qu’il n’est plus tenable.

    Combien de temps nous faudra-t-il pour oublier l’existence de la tour INSEE ? Après l’amnésie de la biodiversité (s’habituer à ne plus voir d’insectes), l’amnésie du climat (considérer comme normales des températures autrefois exceptionnelles), l’amnésie patrimoniale nous guette à mesure que les bâtiments tombent ici et là.

    Penser gagner et pourtant perdre
    Tout comme la perte de ce qui nous est cher, constater la disparition matérielle provoque un mélange de tristesse et de colère. Car il s’agit ici de perdre les recours intentés pour arrêter le désastre, perdre son temps à ne pas être écouté, perdre la bataille du réel en ayant pourtant le sentiment de gagner celle des idées.

    Et pourtant, à Toulouse, Roubaix, Nantes, Besançon, Amiens, Marseille, Châtenay-Malabry, des collectifs de citoyen·nes s’organisent et appellent à un moratoire sur les démolitions prévues. Les luttes jusque-là très locales, se sont rassemblées le 7 février dernier à Pantin pour être reçues par l’ANRU (Agence Nationale du Renouvellement Urbain) et exiger un moratoire sur les démolitions à venir.

    Ces luttes, loin d’être anecdotiques, rassemblent un panel riche de profils et de compétences complémentaires (architectes à la retraite ou tout juste diplômés, juristes, ingénieurs, sociologues, historiens, travailleurs sociaux, activistes écologistes…). Au fur et à mesure qu’elles s’affutent, les expertises citoyennes se positionnent à l’avant-garde des décisions politiques. Elles détricotent les évidences de la destruction et réinvestissent le temps de l’architecture. Autour de ces concernements qui convergent naît un espoir : ce qui était possible hier ne le sera peut-être plus demain. La tour INSEE aurait pu être un magnifique symbole du passage d’une avant-garde (sa construction) à une autre (sa réhabilitation). L’inverse a eu lieu et nous sommes là, à compter chaque jour les étages qui disparaissent. Observateurs attentifs de l’évidente anachronie d’une chute.

    Vanille Busin
    Designer Ingénieure , membre de l’agence Encore Heureux

    Nicola Delon
    Architecte, Cofondateur du collectif Encore Heureux

    Jérôme Denis
    Sociologue, professeur de sociologie à Mines Paris - PSL

    qualités : « son orientation multiple offre des espaces ensoleillés, car aucune façade n’est à l’ombre toute la journée » ; elle permet « l’économie des circulations verticales, concentrées en un point central » ; « la structure poteaux-poutre régulière offre un plan libre, permettant d’imaginer une diversité de configurations et d’usages ».

    Plus frappant, l’étude comparative multicritères de l’État finalement rendue publique en 2022 par Alterea, confirme la possibilité technique d’une réhabilitation et sa pertinence, tant du point de vue environnemental que financier. Ce scénario coûterait « 25 à 52 millions d’euros de moins », soit « 15% à 30% d’économie tout en émettant près de 30% de carbone en moins ». Même en prenant en compte la performance environnementale du bâtiment neuf, « les émissions de CO2 du chantier de démolition-reconstruction sont tellement importantes qu’il faudrait attendre près de 430 années d’exploitation du bâtiment pour les amortir et rentrer dans une phase plus vertueuse que si le bâtiment avait été rénové initialement »[2].

    Interroger les critères

    Pour comprendre ce qui motive les conclusions de cette dernière étude, qui confirme malgré tout la pertinence du projet de démolition-reconstruction, il faut se pencher plus précisément sur sa méthode, et le principe même de l’analyse multicritères. C’est d’ailleurs ce à quoi les grands statisticiens et économistes de l’INSEE appelaient en leur temps, d’Alain Desrosières à François Eymard-Duvernay, à propos de toute forme de mesure : la quantification du monde ne peut s’apprécier, et se discuter, qu’à condition de pouvoir interroger les opérations conventionnelles qui en sont le fondement, en particulier celles qui consistent à produire des équivalences. Autrement dit, il ne faut pas seulement se pencher sur le résultat des calculs, mais questionner en amont leurs postulats et leur périmètre. On est de ce point vue frappés de voir une série de variables très différentes compilées dans des tableaux autour de critères aux intitulés eux-mêmes discutables et rendus commensurables : « patrimonial, architectural et paysager », « fonctionnel », « organisationnel », « environnemental », et bien sûr « économique ». Critères qui, au fil du document, servent à comparer les scénarios (dont plusieurs modalités de réhabilitation), d’abord sous la forme de sous-critères chiffrés, puis de courtes phrases, de l’usage des couleurs rouge et verte, et enfin de… smileys.

    Plusieurs formes d’aplatissement se jouent dans ce dispositif. La première porte sur le sens même de la comparaison, son orientation. L’étude est en effet organisée autour de l’évidence de la démolition, et c’est à l’aune de ce scénario que les autres sont mesurés. Ce seul point de référence témoigne d’une organisation du raisonnement calculatoire qui n’a rien « d’innocent », comme le dirait la philosophe Donna Haraway[3].

    L’effet d’aplatissement se joue aussi dans l’opération technique de la comparaison, ou plutôt des comparaisons accumulées. Qu’est-ce qui est compté, exactement, et qu’est-ce qui ne l’est pas ? De quel droit se permet-on par exemple d’opposer des bilans d’émissions carbone d’opérations, à propos desquelles on peut considérer qu’elles ne sont pas vraiment comparables, notamment parce que la question de la matière est occultée dans le calcul ? En particulier, la durée nécessaire à la constitution des matériaux qui entrent dans la fabrication du béton n’est pas comptée. Ainsi, une grande partie du coût des matériaux est cachée, alors même que ce coût deviendrait inestimable si l’on considérait le sable pour ce qu’il est « réellement » : une ressource non renouvelable. Ailleurs, les émissions carbone du scénario démolition-construction sont compensées uniquement si l’on compte une exploitation du bâtiment neuf sur plus de quatre siècles, alors même que nous n’avons pas 100 ans de recul sur la durée de vie du béton.

    L’aplatissement de la méthode se joue enfin dans le choix des critères et dans la distribution de l’expertise. Alors même que les membres de l’association de défense de la conservation IN C’ Malakoff font preuve d’une remarquable maîtrise du sujet, y compris sur le plan technique, leur parole est restée inaudible face à des décideurs qui font la sourde oreille. À l’heure de la crise climatique et de la défiance grandissante vis-à-vis des autorités politiques et scientifiques, cultiver les conditions d’une démocratie technique est essentiel, en particulier lorsqu’il s’agit d’architecture et d’urbanisme. Une démocratie qui ne consiste pas simplement à rendre acceptables des projets décidés à huis clos, mais au contraire à rendre discutables leurs aspects les plus techniques, qui sont toujours aussi éminemment politiques.

    C’est dans le débat collectif autour des chiffres et des critères que peut s’inventer une échappatoire à l’aplatissement indiscutable des calculs. En reconnaissant que les projets de ce genre ne sont pas seulement affaire de « coûts » et de « bénéfices » dont l’identification tiendrait d’un bon sens partagé, mais qu’ils relèvent de la décision politique. Il faudrait ainsi pouvoir accompagner une « inversion du pensable », pour reprendre la belle expression de Michel de Certeau[4], qui ferait s’imposer l’évitement de la démolition, la prise en compte des cycles longs de la matière, une véritable considération pour les sols et leurs richesses comme autant de points de départ, autant de nouvelles évidences à partir desquelles penser, aménager et ménager.

    Le fait accompli de la disparition

    C’est tout le contraire qui s’est passé à Malakoff à propos de la tour de l’INSEE. Pendant les premières années du projet, c’est la destruction qui a tenu lieu d’évidence. Comme si le bâtiment avait déjà disparu, gommé par la projection d’un futur qui tenait sa force d’une parcelle devenue page blanche. Puis tout est allé très vite. Les travaux de dépollution ont commencé et l’évidence s’est concrétisée dans les premières opérations, dont le coût a pu être comptabilisé dans l’étude multicritères, pesant ainsi en défaveur des autres scénarios, et rendant particulièrement difficile l’élaboration d’alternatives. Cette politique du fait accompli a fait de la réhabilitation une sorte d’incongruité dont la pertinence est devenue de plus en plus complexe à démontrer. Cette difficulté à vouloir arrêter le coup parti est par ailleurs renforcée par le choix de la procédure du marché public initial. En effet dans le cadre d’un « Marché Global de Performance » le commanditaire public confie à un acteur privé, ici Eiffage, la conception, la construction et la maintenance du bâtiment. Toute redirection au cours du processus est rendue quasiment impossible ou très coûteuse au regard des clauses contractuelles initiales.

    La force des évidences tient précisément à ce qu’on ne les voit plus, qu’elles se fondent dans l’arrière-plan de l’expérience. Aujourd’hui, malgré toutes les tentatives citoyennes et juridiques, la tour est en train d’être rasée. Et la manière même dont s’opère la démolition redouble la politique du fait accompli de la disparition. Depuis plusieurs semaines, étage par étage, la tour est effacée, sans fracas, presque silencieusement. Il y a quelque chose de l’anesthésie collective qui se joue dans ce démontage progressif « sans douleur », si loin des explosions spectaculaires qui avaient le mérite d’assumer la violence matérielle et symbolique de la démolition. Il faudrait rester jour et nuit sur le site pour véritablement prendre la mesure de celle-ci. Dessiner des lignes dans le ciel comme on trace un trait sur une bouteille dont on soupçonne que son contenu disparaît à notre insu. Suivre aussi la masse considérable des matériaux qui résulte de cet acte de démolition, et qu’il faut bien transporter, entreposer, retraiter dans le meilleur des cas. Documenter aussi les résidus toxiques récupérés à cette occasion, au premier rang desquels l’amiante. Accompagner, enfin, les ouvriers dont les corps portent aussi les traces de cet effacement.

    Mais déjà, la tour n’est presque plus là. Que restera-t-il dans quelques semaines, dans quelques années ? Comment son absence sera-t-elle éprouvée alors même que son existence n’a pas été jugée digne de considération et que sa démolition est passée inaperçue ?

    Le projet installe les conditions d’une grave amnésie, qui s’étend au-delà de la question strictement patrimoniale. Il perpétue un monde où le rapport aux milieux habités est marqué par l’insensibilité, voire l’insouciance. Un monde où le confort et l’innovation ont été associés à la course au remplacement et à la mise en invisibilité systématique des déchets qu’elle génère[5]. Un monde où l’inattention matérielle et l’oubli sont inscrits au cœur de l’idée de progrès, dont nous sommes de plus en plus nombreu·ses·x à savoir qu’il n’est plus tenable.

    Combien de temps nous faudra-t-il pour oublier l’existence de la tour INSEE ? Après l’amnésie de la biodiversité (s’habituer à ne plus voir d’insectes), l’amnésie du climat (considérer comme normales des températures autrefois exceptionnelles), l’amnésie patrimoniale nous guette à mesure que les bâtiments tombent ici et là.

    Penser gagner et pourtant perdre

    Tout comme la perte de ce qui nous est cher, constater la disparition matérielle provoque un mélange de tristesse et de colère. Car il s’agit ici de perdre les recours intentés pour arrêter le désastre, perdre son temps à ne pas être écouté, perdre la bataille du réel en ayant pourtant le sentiment de gagner celle des idées.

    Et pourtant, à Toulouse, Roubaix, Nantes, Besançon, Amiens, Marseille, Châtenay-Malabry, des collectifs de citoyen·nes s’organisent et appellent à un moratoire sur les démolitions prévues. Les luttes jusque-là très locales, se sont rassemblées le 7 février dernier à Pantin pour être reçues par l’ANRU (Agence Nationnale du Renouvellement Urbain) et exiger un moratoire sur les démolitions à venir.

    Ces luttes, loin d’être anecdotiques, rassemblent un panel riche de profils et de compétences complémentaires (architectes à la retraite ou tout juste diplômés, juristes, ingénieurs, sociologues, historiens, travailleurs sociaux, activistes écologistes…). Au fur et à mesure qu’elles s’affutent, les expertises citoyennes se positionnent à l’avant-garde des décisions politiques. Elles détricotent les évidences de la destruction et réinvestissent le temps de l’architecture. Autour de ces concernements qui convergent naît un espoir : ce qui était possible hier ne le sera peut-être plus demain. La tour INSEE aurait pu être un magnifique symbole du passage d’une avant-garde (sa construction) à une autre (sa réhabilitation). L’inverse a eu lieu et nous sommes là, à compter chaque jour les étages qui disparaissent. Observateurs attentifs de l’évidente anachronie d’une chute.

    Vanille Busin
    DESIGNER INGÉNIEURE , MEMBRE DE L’AGENCE ENCORE HEUREUX

    Nicola Delon
    ARCHITECTE, COFONDATEUR DU COLLECTIF ENCORE HEUREUX

    Jérôme Denis
    SOCIOLOGUE, PROFESSEUR DE SOCIOLOGIE À MINES PARIS - PSL

    Notes
    [1] Administration centrale des ministères sociaux.

    [2] Calculs réalisés par l’association IN C Malakoff, à partir des chiffres fournis dans l’étude multicritères.

    [3] Donna J. Haraway, « Situated Knowledges : The Science Question in Feminism and the Privilege of Partial Perspective », Feminist studies, 14(3), 575‐599, 1988.

    [4] Michel de Certeau, L’écriture de l’histoire, Gallimard, 1975.

    [5] Jeanne Guien, Le consumérisme à travers ses objets, Divergences, 2021.

  • How to Clean Your Cast Iron. Plus, More Kitchen Questions, Answered. - The New York Times
    https://www.nytimes.com/2024/04/08/dining/kitchen-myths.html?smtyp=cur

    Apart from the best way to cook rice, nothing gets cooking-science types more riled up than cast-iron pans. If you haven’t cooked in one, you might wonder what all the fuss is about, both on the cooking and the cleaning front.

    For cooking, cast iron has a great weight and a porous surface — slightly rough, compared with smooth stainless steel or a nonstick coating — that makes it ideal for searing. The surface absorbs oil, which hardens over heat and over time into a shiny, nearly nonstick patina. This process is called seasoning, not in the sense of adding salt to taste but in the sense of developing a well-used, trusted tool.

    I have been told that a truly well-seasoned cast-iron pan can cook an omelet without sticking, but I am too chicken to try. I have also been told that the best way to clean my skillet is to boil it, to bury it in the sand, and to never wash it at all. None of these seem like practical options.

    The prohibition against soap comes from a time when all soap was made with lye, which could eat through a patina in minutes. And it’s true that most of the time, soap is unnecessary. Most of your cleaning power should come from hot water and gentle scrubbing or brushing, the way cast-iron pots like Chinese woks and Indian kadai are traditionally cleaned.

  • Pythagoras was wrong: there are no universal musical harmonies, study finds
    https://www.cam.ac.uk/research/news/pythagoras-was-wrong-there-are-no-universal-musical-harmonies-study-finds

    https://www.youtube.com/watch?v=gm2midoq-KQ

    Tom Almeroth-Williams - The tone and tuning of musical instruments has the power to manipulate our appreciation of harmony, new research shows. The findings challenge centuries of Western music theory and encourage greater experimentation with instruments from different cultures.

    “There are many more kinds of harmony out there.” Peter Harrison

    According to the Ancient Greek philosopher Pythagoras, ‘consonance’ – a pleasant-sounding combination of notes – is produced by special relationships between simple numbers such as 3 and 4. More recently, scholars have tried to find psychological explanations, but these ‘integer ratios’ are still credited with making a chord sound beautiful, and deviation from them is thought to make music ‘dissonant’, unpleasant sounding.

    But researchers from the University of Cambridge, Princeton and the Max Planck Institute for Empirical Aesthetics, have now discovered two key ways in which Pythagoras was wrong.

    Their study, published in Nature Communications, shows that in normal listening contexts, we do not actually prefer chords to be perfectly in these mathematical ratios.

    “We prefer slight amounts of deviation. We like a little imperfection because this gives life to the sounds, and that is attractive to us,” said co-author, Dr Peter Harrison, from Cambridge’s Faculty of Music and Director of its Centre for Music and Science.

    The researchers also found that the role played by these mathematical relationships disappears when you consider certain musical instruments that are less familiar to Western musicians, audiences and scholars. These instruments tend to be bells, gongs, types of xylophones and other kinds of pitched percussion instruments. In particular, they studied the ‘bonang’, an instrument from the Javanese gamelan built from a collection of small gongs.

    “When we use instruments like the bonang, Pythagoras’s special numbers go out the window and we encounter entirely new patterns of consonance and dissonance,” said Dr Harrison, a Fellow of Churchill College.

    “The shape of some percussion instruments means that when you hit them, and they resonate, their frequency components don’t respect those traditional mathematical relationships. That’s when we find interesting things happening.”

    “Western research has focused so much on familiar orchestral instruments, but other musical cultures use instruments that, because of their shape and physics, are what we would call ‘inharmonic’.

    The researchers created an online laboratory in which over 4,000 people from the US and South Korea participated in 23 behavioural experiments. Participants were played chords and invited to give each a numeric pleasantness rating or to use a slider to adjust particular notes in a chord to make it sound more pleasant. The experiments produced over 235,000 human judgments.

    The experiments explored musical chords from different perspectives. Some zoomed in on particular musical intervals and asked participants to judge whether they preferred them perfectly tuned, slightly sharp or slightly flat. The researchers were surprised to find a significant preference for slight imperfection, or ‘inharmonicity’. Other experiments explored harmony perception with Western and non-Western musical instruments, including the bonang.
    Instinctive appreciation of new kinds of harmony

    The researchers found that the bonang’s consonances mapped neatly onto the particular musical scale used in the Indonesian culture from which it comes. These consonances cannot be replicated on a Western piano, for instance, because they would fall between the cracks of the scale traditionally used.

    “Our findings challenge the traditional idea that harmony can only be one way, that chords have to reflect these mathematical relationships. We show that there are many more kinds of harmony out there, and that there are good reasons why other cultures developed them,” Dr Harrison said.

    Importantly, the study suggests that its participants – not trained musicians and unfamiliar with Javanese music – were able to appreciate the new consonances of the bonang’s tones instinctively.

    “Music creation is all about exploring the creative possibilities of a given set of qualities, for example, finding out what kinds of melodies can you play on a flute, or what kinds of sounds can you make with your mouth,” Harrison said.

    “Our findings suggest that if you use different instruments, you can unlock a whole new harmonic language that people intuitively appreciate, they don’t need to study it to appreciate it. A lot of experimental music in the last 100 years of Western classical music has been quite hard for listeners because it involves highly abstract structures that are hard to enjoy. In contrast, psychological findings like ours can help stimulate new music that listeners intuitively enjoy.”
    Exciting opportunities for musicians and producers

    Dr Harrison hopes that the research will encourage musicians to try out unfamiliar instruments and see if they offer new harmonies and open up new creative possibilities.
    ...

    #musique #musicologie #science #eurocentrisme #notatiin #harmonie #histoire