vous demande pardon ? Ah si, oui, bien sûr, elle a beau être une dictateuse cruelle et sanguinaire ça lui fait quand même un petit quelque chose, prétendre l’inverse serait mentir — or on peut mentir à tout le monde sauf à un Lectorat. Bref, au début elle voulait seulement nettoyer sa messagerie, vous voyez, n’effacer que les centaines voire milliers de « Cc sa va », « T belle », « T ou moi 69 » et autres « Tu veux voir la fusée de Jeff Bezos » qu’elle a reçus (et superbement ignorés) en seize années d’utilisation de Messenger®. Et puis finalement voilà qu’elle supprime tout, enfin tout ce qui date de plus d’un mois, c’est fastidieux parce sur ce service on ne peut pas tout faire d’un seul coup, on est obligée de sélectionner les « conversations » une par une et de refaire toute la procédure à chaque fois. Cependant le pli est vite pris : c’est une sorte de taylorisme et faute de pouvoir mécaniser la machine on se mécanise soi-même : sélectionner, effacer, confirmer, sélectionner, effacer, confirmer, sélectionner, effacer, confirmer... elle parvient à en faire une douzaine par minute, s’il y avait une contremaîtresse en bout de chaîne celle-ci la féliciterait, elle est devenue une stakhanoviste de la suppression des messages.
Les relit-elle avant de les enlever ? Ha ha, non, bien sûr que non, ça ferait baisser la cadence. D’ailleurs elle ne les retire pas de sa mémoire, hein, elle retire seulement un des chemins d’accès à cette dernière. Tout reste vraisemblablement stocké dans un coin de ses neurones — et dans un serveur informatique situé au fin fond de Calcutta ou de la Vallée du Silicone. Seulement voilà : quand la vieille Garreau sera morte, c’est-à-dire d’ici dix à douze minutes, et que ses opposant·e·s politiques entreprendront de fouiller son ordinateur, iels n’y trouveront plus rien. Enfin peut-être que si si ce sont des as en informatique, mais sinon non. En dehors de ce qui est public sur les réseaux, ce sera mystère et boule de gomme : on ne saura ni qui elle aurait pu aimer, ni avec qui elle a frayé, ni ce qu’elle a comploté.
Bien sûr tout ça elle ne va pas le raconter sur sa page Facebook, ça pourrait vexer des abonné·e·s — or elle n’est pas là pour vexer quiconque. De toute façon effacer les traces ne signifie pas que l’on renie ce qui fut : cela signifie seulement que l’on sait qu’on ne se baigne jamais deux fois dans la même rivière et que l’on veut arriver toute nue au Paradis.
#JeNeSuisPasFolleVousSavez.